Dix-huit ans après sa mort, ce poignant portrait, tendrement orchestré par sa mère Nadine, dévoile la formidable comédienne et la femme éperdument attachante que fut Marie Trintignant.
Sa fin tragique en août 2003, à 41 ans, sous les coups de son compagnon, a éclipsé son parcours de comédienne. Élevée par une mère cinéaste, Nadine, et un père acteur, Jean-Louis, avec qui elle nouera une tendre complicité artistique, Marie Trintignant rêve très tôt de devenir actrice, même si elle prétend, pince-sans-rire, dans une interview, avoir hésité entre “vétérinaire et courtisane”. Après avoir tourné enfant dans Défense de savoir, réalisé par sa mère, qui lui offrira plusieurs rôles marquants, elle fait des débuts fracassants dans Série noire d’Alain Corneau, son beau-père. Novice passionnée, elle se met à nu, au sens propre comme au figuré, dans un climat heureusement bienveillant. “Je me jetais dans tout, prête à mourir à chaque prise parce que je n’avais pas de métier, parce que j’avais Patrick [Dewaere] en face qui donnait tellement qu’on ne pouvait pas être neutre”, raconte-t-elle. Alors âgée de 17 ans, elle se dit que ce métier qu’elle prend trop à cœur risque de la briser. Elle apprendra à mettre de la distance, notamment en travaillant pour l’ami Chabrol, dans une ambiance décontractée qui lui fait le plus grand bien. “Il m’a fait comprendre que dans le ludisme on allait plus loin”, commente-t-elle. Défaite, en larmes, la comédienne atteint des sommets d’interprétation dans Betty, où elle joue le rôle d’une femme alcoolique en rupture avec sa famille. Elle tourne aussi avec Ettore Scola, Pierre Salvadori, Michel Deville, et découvre au théâtre le plaisir des répétitions et du contact avec le public. Séduit par son jeu, Jean-Pierre Marielle, qui lui donne la réplique dans Le retour d’Harold Pinter, se déclare “son groupie”.
Lettre d’amour
Dix-huit ans après sa mort, la réalisatrice Nadine Trintignant signe un portrait juste et bouleversant de sa fille, avec, pour commentaire, la lettre d’amour posthume qu’elle lui adresse. À la fin du film, elle évoque avec une touchante sobriété le drame qui brisa sa vie, en reliant le sort de sa fille à celui de toutes les femmes battues. Débordant d’émotion, à l’image du jeu incandescent de l’actrice, ce documentaire, affectueux tissage d’archives, d’extraits de films, de coulisses de tournages et de répétitions – dont une séquence douce et enjouée avec François Cluzet qui fut son compagnon et avec qui elle écrivit une pièce à la poésie fantasque –, révèle la femme attachante, bourrée de charme, d’intelligence et d’humour que fut Marie Trintignant.